

Évidemment, vous pourrez trouver un peu bizarre que je partage mon avis de lecture sur Dans les forets de Sibérie, alors que Sylvain Tesson vient de remporter le prix Renaudot 2019 avec La Panthère des neiges. Mais j’avais celui-là dans ma bibliothèque (arrivé, je ne sais pas trop comment d’ailleurs !), donc comme tout le monde parlait de Sylvain Tesson à la rentrée de septembre, j’ai commencé à le feuilleter, puis je me suis assise dans le canapé, puis les heures ont passé… et j’ai refermé la dernière page du livre. Un gros coup de cœur !
Sylvain Tesson raconte son séjour de six mois dans une isba de bois sur les bord du lac Baïkal. Il avait envie de découvrir, avant ses quarante ans, la vie d’ermite au fond des bois. Bing, il l’a fait ! En écrivant, je me demande : comment Sylvain Tesson a fait pour écrire un récit de 280 pages aussi captivant alors que ses journées s’égrènent dans une quasi-solitude, sans événement majeur, avec le froid glacial comme protagoniste ?!
On suit Sylvain Tesson dans ses contemplations, dans ses descriptions précises et poétiques de la nature, des arbres, de la glace, du vent, dans ses pensées acérées sur le monde contemporain consumériste et avide de sens, sur la condition de l’homme. On le suit dans ses promenades par -30 degrés pour aller rendre visite à un voisin qui vit à plusieurs heures de marche. On y lit des instants de vérité, de bouleversements. Lire Dans les forêts de Sibérie offre un instant de magie, de temps suspendu, de clairvoyance.
Nos semblables confirment la réalité du monde. Si l’on ferme les yeux en ville, quel soulagement que la réalité ne s’annule pas : autrui continue à la percevoir ! L’ermite est seul, face à la nature. Il demeure l’unique contemplateur du réel, porte le fardeau de la représentation du monde, de sa révélation au regard humain.
L’ennui ne me fait aucune peur. Il y a morsure plus douloureuse : le chagrin de ne pas partager avec un être aimé la beauté des moments vécus. La solitude : ce que les autres perdent à n’être pas auprès de celui qui l’éprouve.
Sans oublier la vodka… en abondance… et les gueules de bois du lendemain, le thé brûlant, la chaleur de la cabane. Et la lecture, les livres, les citations de ceux qu’il est en train de lire et les réflexions qu’elles lui engendrent… J’ai adoré découvrir « la liste de lectures idéales compose à Paris avec grand soin en prévision d’un séjour de six mois dans la forêt sibérienne ». Pas moins de 68 livres : Michel Tournier, Michel Déon, Sade, Truman Capote, James Ellroy, Jünger, Nietzsche, Conrad, Hemingway, Shakespeare, James Ellroy, Romain Gary… De quoi alimenter ma liste de bouquins à emprunter à la bibliothèque pour les années à venir !
Dans les forêts de Sibérie, de Sylvain Tesson, Gallimard, 2011.
C’est drôle, j’ai justement regardé ce bouquin dans ma bibliothèque il y a quelques jours. Aude me l’avait offert à l’hiver 2012 et je n’ai pas du tout accroché à l’époque, je l’avais donc abandonné en cours de route. À ce moment là, j’étais en congé maternité, portée par l’optimisme sans limites que mon nouveau-né m’inspirait et je n’avais aucune envie de lire ses réflexions « acérées » sur le monde contemporain comme tu l’écris. Et puis la nature glacée, les moins trente…alors que l’hiver québécois me pesait, je n’ai pas pu. Et puis y a quelques jours, deux phrases du quatrième de couverture ont résonné en moi et m’ont donné envie d’essayer de nouveau. « Et si la liberté consistait à posséder le temps? Et si le bonheur revenait à disposer de solitude, d’espace et de silence- toutes choses dont manqueront les générations futures?
Il est donc sur ma liste des lectures de 2020 🙂
J’aimeAimé par 1 personne
Je te comprends ! Il y a un temps pour chaque livre. La lecture de ce livre m’a beaucoup apaisée. J’espère que tu y trouveras la même sérénité que celle qui m’a gagnée 🙂
J’aimeJ’aime